Déterminants et conséquences de l’obésité de l’adulte en France selon la cohorte NutriNet-Santé

NutriNet-Santé, débuté en 2009, est une étude de cohorte française en population générale, prospective et en ligne, toujours active, à laquelle se sont inscrits plus de 173 000 adultes ayant accès à Internet. Son but est d’examiner, d’une part, la relation entre la nutrition, la santé et la mortalité et, d’autre part, les déterminants des habitudes alimentaires et de l’état nutritionnel. Les recherches sur l’obésité dans le cadre de NutriNet ont donné lieu à 29 publications indexées (sur un total de 220 issues de NutriNet) qu’il paraissait souhaitable de synthétiser afin d’avoir une vision claire et actualisée des déterminants et des conséquences de l’obésité en France. C’est chose faite avec ce texte. Les données utilisées dans les publications faisant l’objet de cette synthèse ont été recueillies à intervalles réguliers à partir d’un questionnaire en ligne validé portant sur des caractéristiques anthropométriques et socio-démographiques, le mode de vie, l’activité physique (questionnaire IPAQ), la santé (antécédents familiaux, maladies actuelles et traitements en cours) et, bien sûr, les consommations alimentaires autodéclarées en ligne à intervalles réguliers. Le questionnaire en ligne concernant l’obésité a été testé et validé par rapport au poids et à la taille mesurés lors de l’examen clinique d’un sous-groupe de participants qui comportait une mesure de la circonférence abdominale et des hanches et un examen par impédancemétrie. L’effectif des 29 études publiées entre 2013 et 2022 (dont 7 études longitudinales avec un suivi de 2,8 à 6 ans) allait de 6 352 à 110 260 sujets d’âge moyen 43 à 54 ans majoritairement féminin (< 70 %). Les études ayant exploré les déterminants ont montré qu’un régime alimentaire favorable à la santé, la consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique, l’adhésion au modèle alimentaire français, la planification des repas, l’alimentation intuitive et la pratique de la marche et/ou du vélo étaient inversement associés à l’obésité. Il existait également une association inverse avec l’optimisme, le fait de manger en pleine conscience et la pratique de techniques de relaxation (yoga, tai-chi, etc.). En revanche, l’alimentation émotionnelle, les préférences pour le gras et le salé ou le fait de vivre dans un quartier défavorisé (banlieues des grandes villes) étaient associés positivement à l’obésité. Dans les études prospectives, la consommation d’aliments biologiques, l’adéquation aux recommandations nutritionnelles, un haut niveau de durabilité de l’alimentation, la méthode de préparation des repas, la préférence pour les aliments au goût sucré étaient inversement associés à l’obésité. A contrario, la consommation d’aliments ultra-transformés et la préférence pour les produits gras étaient associés positivement à l’obésité. Les 5 études transversales ayant exploré les conséquences de l’obésité ont mis en évidence une relation positive avec la somnolence, la migraine, la dyspepsie fonctionnelle et l’insomnie chronique chez les femmes alors qu’il existe une relation inverse avec l’insomnie aiguë chez les hommes. L’étude d’une large cohorte de population générale française s’intéressant à la nutrition dans tous ses aspects, y compris l’activité physique et les facteurs psychologiques, a permis de mettre en lumière quelques facteurs de risque ou protecteurs de l’obésité dont certains étaient bien connus et d’autres beaucoup moins. Les limites de l’étude sont celles de toutes les études transversales et, plus particulièrement pour NutriNet, le fait que 1) la cohorte ne peut se prévaloir d’être représentative de la population s’agissant de personnes à l’aise avec l’outil informatique et intéressées par la problématique de la nutrition, 2) les données exploitées reposent sur une auto-déclaration sans suivi clinique, 3) la multi-factorialité n’a pas été analysée. Les associations décrites n’ont pas valeur de causalité mais peuvent susciter des hypothèses de recherche innovantes telles que la relation de l’obésité avec la qualité du sommeil ou la consommation d’aliments ultra-transformés ou encore l’adéquation aux recommandations nutritionnelles.